The Third Chimpanzee.ebook
Le premier créole que j’aie jamais rencontré a été cette lingua franca, de Nouvelle-Guinée appelée « néomélanésien » ou « pidgin anglais ». Cette dernière dénomination est erronée, car le néomélanésien n’est pas un pidgin, mais bien plutôt un créole, issu d’un pidgin perfectionné – j’expliquerai plus loin la différence entre créole et pidgin –, et il ne représente que l’une des nombreuses langues apparues indépendamment, que l’on nomme également à tort « pidgins anglais ».
Lorsque je suis arrivé en Papouasie-Nouvelle-Guinée et ai entendu pour la première fois le néomélanésien, ma première réaction fut de rire. Cela sonnait comme une sorte de « langage bébé », diffus et sans grammaire. J’ai découvert également que les règles de grammaire du néomélanésien sont aussi strictes que celles de l’anglais.
Si le néomélanésien est en apparence simple et d’un emploi réellement souple, cela tient en partie à son vocabulaire, en partie à sa grammaire. Son vocabulaire est fondé sur un nombre assez restreint de mots de base, dont le sens varie avec le contexte et peut s’élargir métaphoriquement. Par exemple, s’il est vrai que le mot néomélanésien « gras » peut correspondre au mot anglais « grass » [herbe] (d’où l’expression « gras bilong solwara » [herbe d’eau salée] signifiant « algue »), il peut aussi vouloir dire « cheveux », et c’est pourquoi « un homme chauve » se dit « man i no gat gras long head bilong em ».
« Banis » provient de l’altération du mot anglais « fence » [clôture], car les Néo-Guinéens n’arrivent pas bien à prononcer la consonne f, ni la double consonne nc. « Susu » est un mot malais signifiant « lait » et par métaphore il désigne également les seins. À partir de là, sont formées les expressions pour désigner le « bout de sein » (« ai [eye] bilong susu » [œil de sein]), la « petite fille prépubère » (« i no gat susu bilong em » – elle n’a pas de seins), l’adolescente (« susu i sanap [stand up] » – elle a les seins dressés), la vieille femme (« susu i pundaum pinis [fall down finish] » – les seins sont tombés). La combinaison des deux mots de base, « banis » et « susu », donnant l’expression « banis bilong susu » [clôture de seins], désigne donc le soutien-gorge, en tant qu’enclos pour les seins, de la même manière que « banis pik » [clôture porc] désigne la porcherie, en tant qu’endos pour les porcs
Commentaires recommandés
Aucun commentaire à afficher.
Veuillez vous connecter pour commenter
Vous pourrez laisser un commentaire après vous êtes connecté.
Je veux revenir!